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Mali : un expert de l’ONU juge nécessaire une stratégie de prévention des violations des droits de l'homme

Les activités civilo-militaires de la MINUSMA dans la région centrale de Mopti au Mali incluent des séances de sensibilisation aux droits de l’homme.
Photo : MINUSMA
Les activités civilo-militaires de la MINUSMA dans la région centrale de Mopti au Mali incluent des séances de sensibilisation aux droits de l’homme.

Mali : un expert de l’ONU juge nécessaire une stratégie de prévention des violations des droits de l'homme

Droits de l'homme

A l’issue d’une visite au Mali, l’Expert indépendant sur la situation des droits de l’homme dans ce pays, Alioune Tine, a exprimé mardi sa profonde préoccupation concernant la détérioration continue de la situation sécuritaire et humanitaire au centre et au nord du Mali.

Plusieurs facteurs combinés, notamment les violences sur fond de tensions communautaires, les opérations menées par les réseaux de crime organisé, les groupes extrémistes armés, et les opérations anti terroristes des forces maliennes et internationales qui s’en suivent, créent un profond sentiment de peur et d'insécurité au sein des populations civiles.

Dans la région de Mopti, beaucoup de villages sont sous l’emprise de djihadistes, ce qui contribue à empêcher les populations locales d’exercer leurs activités quotidiennes et les condamne à la faim et à la misère. Selon l’expert, tout doit être fait pour mettre immédiatement un terme à cette situation inacceptable, et les initiatives du gouvernement pour y remédier doivent être renforcées, compte tenu de l’ampleur et de la complexité de la situation.

« De graves et récurrentes violations et abus des droits de l’homme, y compris des allégations d’exécutions extrajudiciaires, d’enlèvements, de tortures, de mauvais traitements et détentions illégales, sont commis en toute impunité. De plus, des localités qui n’étaient pas affectées il y a quelques mois sont maintenant touchées par ces violences », a déclaré l'expert dans un communiqué de presse.

« Il faut d'urgence une réponse militaire efficace, avec des hommes bien équipés et bien formés menant des opérations en toute conformité avec les droits de l’homme, pour faire cesser les violences dans les meilleurs délais et protéger les populations civiles », a-t-il ajouté. Il a pris note de l'ouverture d'enquêtes concernant l'implication de militaires maliens dans des violations présumées des droits de l'homme.

M. Tine, qui au cours de sa mission a visité les régions de Bamako et Mopti, estime qu'il faut aller plus loin. La seule manière pour l’Etat malien de mettre fin à l’impunité est de faire en sorte que la responsabilité de toutes les personnes impliquées dans des graves violations des droits de l'homme soit établie à la suite de procès justes et équitables.

Il faut trouver une stratégie globale et coordonnée de réponse et de prévention de la violence et des abus de droits de l'homme dans le pays - Alioune Tine

« Il faut trouver une stratégie globale et coordonnée de réponse et de prévention de la violence et des abus de droits de l'homme dans le pays », a-t-il affirmé.

Selon lui, en l’absence d'une solution urgente à la grave crise malienne, de solutions concrètes à la pauvreté dans les régions du nord et du centre, et d’une politique de lutte contre la corruption, il sera difficile de mettre fin aux les violences au Mali.

L’expert a jugé encourageant les efforts de la Commission de réconciliation qui travaille avec les communautés pour aider à créer les conditions nécessaires pour une réconciliation intercommunautaire.

Selon lui, le soutien de la communauté internationale est nécessaire pour aider les autorités maliennes à s’attaquer aux problèmes auxquels le pays fait face. Les principales préoccupations soulevées par ses interlocuteurs incluent l’insécurité générée par les violences intercommunautaires, la violence des groupes armés et le crime organisé, mais aussi le déficit de participation des femmes et des jeunes au processus de paix, la fermeture des écoles qui continue au nord et au centre du pays et le chômage chronique des jeunes.

L’Expert indépendant a dénoncé les menaces et attaques de groupes extrémistes violents contre les écoles et le personnel scolaire qui persistent dans plusieurs régions du centre et du nord. Les chiffres de décembre 2018 montrent que 807 écoles restent fermées dans l’ensemble du pays en raison de l’insécurité.

« Selon des sources concordantes, il s’avère que des membres de Jama’at nusrat al-Islam wal Muslimeen (JNIM) ont à plusieurs reprises menacé les populations de plusieurs villages de la région en cas de réouverture d’écoles publiques laïques. Le gouvernement malien devrait prendre toutes les mesures requises pour garantir le droit à l’éducation aux enfants des régions concernées », a dit M. Tine.

Le déficit d'une présence effective et efficace de l'Etat dans le centre et le nord est l’une des causes aggravantes de la situation sécuritaire actuelle avec un impact négatif sur la jouissance des droits de l’homme, et en particulier du droit au développement pour la population du Mali.