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COP24 : en Afrique, la préparation aux effets du changement climatique ne peut pas être une réflexion « après coup »

Des bergers amènent leur bétail à un point d'eau au Niger, dans la région du Sahel.
FAO/Giulio Napolitano
Des bergers amènent leur bétail à un point d'eau au Niger, dans la région du Sahel.

COP24 : en Afrique, la préparation aux effets du changement climatique ne peut pas être une réflexion « après coup »

Climat et environnement

Des mesures urgentes sont nécessaires sur l'ensemble du continent africain pour atténuer les risques du changement climatique et préserver la décennie de gains économiques et sociaux, a alerté le Programme de développement des Nations Unies ( PNUD) dans un nouveau rapport publié jeudi en marge de la conférence de l'ONU sur le climat (COP24) à Katowice, en Pologne.

« L’Afrique est à un tournant », a déclaré Ahunna Eziakonwa, la Directrice du Bureau pour l’Afrique du PNUD.

Selon elle, en dépit des inégalités persistantes, les pays du continent ont réalisé « une croissance économique, politique et sociale impressionnante au cours des dernières décennies ». Toutefois « le changement climatique, les sécheresses, les inondations, la modification des régimes pluviométriques et les conflits pourraient réduire à néant les efforts pour combattre la faim et atteindre les objectifs énoncés dans l'Accord de Paris et le Programme de développement durable à l'horizon 2030 ».

Pendant deux semaines, la COP24 a rassemblé des milliers de décideurs, de défenseurs et de militants de l'action pour le climat, avec un objectif clé : adopter des lignes directrices mondiales pour les 197 parties à l'Accord de Paris. Lors de la COP21 organisée en 2015 dans la capitale française, les pays se sont engagés à limiter le réchauffement climatique à moins de 2 ° C - et aussi proche que possible de 1,5 ° -  au-dessus des niveaux préindustriels.

L'étude montre que, si le monde ne parvient pas à limiter le réchauffement climatique à moins de 2 ° C, les familles africaines auront de plus en plus de difficultés à se nourrir et le risque de famine et de pauvreté aiguë augmentera.

 

Des enfants mangeant un repas de riz et de poisson, dans le village de Tagal, dans la région du lac Tchad, au Tchad.
Photo UNICEF/Tremeau
Des enfants mangeant un repas de riz et de poisson, dans le village de Tagal, dans la région du lac Tchad, au Tchad.

 

La hausse des niveaux de pauvreté pourrait à son tour crée une spirale sans fin qui limiterait davantage la capacité des communautés à gérer les risques liés au climat, pèserait davantage sur les mécanismes de gestion déjà surchargés et se traduirait par des schémas migratoires plus dangereux, des épidémies graves comme l'épidémie d'Ebola de 2014, et une instabilité politique accrue.

Le rapport du PNUD s'appuie sur des années d'expérience et sur les enseignements tirés de projets visant à permettre aux communautés de s'adapter aux changements climatiques et de renforcer leur résilience.

Le document maintient qu’avec la persistance de l’augmentation des températures en Afrique, le soutien aux initiatives d'adaptation au climat doit être renforcé et accéléré de manière urgente sur le continent, en particulier dans les 34 « pays les moins avancés » (PMA) africains.

« Les PMA font partie des pays les plus vulnérables au changement climatique, tout en étant les moins aptes à s’adapter. Dans de nombreux cas, ils ne disposent pas des capacités techniques, financières et institutionnelles nécessaires pour identifier les meilleurs moyens de renforcer leur résilience », a déclaré Gustavo Fonseca, du Fonds pour l'environnement mondial (Global Environnement Facility), une institution qui a financé de nombreux projets d'adaptation au climat en Afrique.

Pour la première fois en plus de 10 ans, la faim dans le monde est à la hausse, touchant 11% de la population mondiale, selon des estimations récentes de l'Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO).

Cette augmentation serait notamment due aux sécheresses extrêmes induites par un cycle El Niño inhabituellement fort, qui a poussé près de 40 millions de personnes en Afrique à avoir besoin d'une assistance humanitaire.

 

Terres stériles en raison de la sécheresse provoquée par El Niño dans le pays d'Afrique australe du Lesotho. Photo : FAO
Terres stériles en raison de la sécheresse provoquée par El Niño dans le pays d'Afrique australe du Lesotho. Photo : FAO

 

« Les approches réactives à la sécurité alimentaire et à la reprise après sinistre coûte des milliards de dollars en perte de PIB à la population africaine, et siphonne des ressources du gouvernement qui devraient être à l’éducation, aux programmes sociaux, aux soins de santé, au développement des entreprises et à l’emploi », a déclaré Ahunna Eziakonwa. « Ce ne peut pas être une réflexion après coup », a alerté la Directrice pour l'Afrique du PNUD.

« L'élément essentiel est la connaissance et le renforcement des capacités », a pour sa part déclaré Rohini Kohli, qui dirige la planification de l'adaptation au PNUD.

Cependant, les mesures permettant aux communautés de s’adapter aux changements climatiques sont coûteuses et nécessiteront des mécanismes financiers créatifs et un engagement substantiel du secteur privé, qui a leur tour exigeront que les pays développés honorent l’engagement qu’ils ont pris à Paris en 2015, de consacrer 100 milliards de dollars par an pour soutenir l’action climatique dans les pays en développement.

Le rapport du PNUD analyse plusieurs réussites frappantes en matière d'adaptation au changement climatique en Afrique au cours des 10 dernières années, y compris des projets visant à améliorer la sécurité alimentaire au Bénin, au Mali, au Niger et au Soudan ; à aider les gouvernements à se doter de systèmes d'information sur le climat et d'alerte rapide améliorés afin de sauver des vies en cas de tempête rapide ; et à habiliter les femmes afin qu’elles deviennent des championnes efficaces de l'action contre le changement climatique.