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Afghanistan : le Président Ghani constitue une équipe pour négocier la paix avec les talibans

Président Ghani de l'Afghanistan à l'ouverture de la 72ème session de l'Assemblée générale à New York (archives).
Photo : ONU/Cia Pak
Président Ghani de l'Afghanistan à l'ouverture de la 72ème session de l'Assemblée générale à New York (archives).

Afghanistan : le Président Ghani constitue une équipe pour négocier la paix avec les talibans

Paix et sécurité

« L’incertitude a hanté les Afghans pendant des dizaines d’années. Mais ces quatre dernières années, les choses ont changé ». Au deuxième et dernier jour de la Conférence ministérielle organisée à Genève par la Mission d’assistance des Nations unies en Afghanistan (MANUA) et Kaboul, le Président afghan s’est interrogé sur le futur réservé à son pays.

« Ce qui est ressorti ces quatre dernières années, c’est que de nouveaux Afghans mènent un nouvel Afghanistan », avec comme acteurs clés, « cette génération du changement », a déclaré le Président Mohammad Ashraf Ghani. 

Devant la Salle du conseil du Palais des Nations, M. Ghani a souligné les schémas naissant à mi-parcours de cette décennie consacrée à la transformation de son pays. Il a ainsi répertorié trois changements majeurs. Tout d’abord les hommes et les femmes en Afghanistan, ont à présent pris en main les valeurs de la constitution, notamment concernant l’égalité de tous les citoyens.

L'Etat de droit est le ciment qui unit tous les citoyens et l’Etat dans le cadre d’un contrat social - Mohammad Ashraf Ghani, Président de l'Afghanistan

Deuxièmement, il y a un « consensus renouvelé » qui veut que la constitution soit la règle qui lie les Afghans en tant que citoyen libre d’un Etat démocratique. « Troisièmement, nous estimons que l’Etat de droit est le ciment qui unit tous les citoyens et l’Etat dans le cadre d’un contrat social ». 

Mais ces schémas sont parfois remis en cause par l’instabilité. Le président afghan a ainsi déclaré qu’une « feuille de route pour les négociations de paix » avait été établie. Le Président Ghani a rappelé que Kaboul a déjà constitué les organismes et les mécanismes qui permettront d’élaborer un accord de paix. Ce qui permet aux autorités afghanes de « passer au chapitre suivant ».

« Nous voulons un accord de paix dans lequel les Talibans afghans seront inclus dans une société démocratique et inclusive », fait-il valoir. 

Nous ne pouvons pas laisser passer cette occasion - António Guterres

Sur cette feuille de route, il s’agit pour Kaboul de se porter garant d’une société qui assure « les droits et obligations constitutionnelles de tous les citoyens, en particulier les femmes ». « Aucun groupe armé lié aux groupes terroristes transnationaux ne pourront participer au processus politique », précise le Président Ghani.  

« Nous avons mis en place les organes et les mécanismes nécessaires pour parvenir à un accord de paix », a-t-il dit, précisant qu’une équipe de négociation de 12 personnes avait été constituée, dirigée par son chef de cabinet Abdul Salam Rahimi. Un cabinet conseil sera également créé qui comprendra neuf commissions représentatives.

« L’élection présidentielle au printemps sera la clé du succès des négociations de paix. Le peuple afghan a besoin d’un gouvernement élu avec pour mandat d’obtenir la ratification, de mettre en œuvre l’accord de paix et conduire le processus de réconciliation sociale », a-t-il dit. « Cette mise en œuvre prendra au moins cinq ans pour réintégrer six millions de réfugiés et de personnes déplacées », a-t-il estimé.

En écho à cet agenda politique, la Secrétaire générale adjointe aux affaires politiques a lu le message du Chef de l’ONU, António Guterres. « Des événements quotidiens nous rappellent le bilan épouvantable du conflit en Afghanistan », a ainsi déclaré Mme Rosemary DiCarlo, insistant sur l’urgence de « trouver une solution politique ».

Dans son discours, M. Guterres s’est félicité des « récents efforts de paix, y compris de l’offre du gouvernement de tenir des pourparlers sans conditions préalables ». « Nous nous félicitons également des initiatives prises par différents Etats membres en faveur de la paix », a-t-il poursuivi.

La Suisse prête à accueillir « tout cycle de pourparlers »

D’autant qu’au moment où se tient cette Conférence de Genève sur l’Afghanistan, l’ONU y voit « peut-être une rare occasion de prendre des mesures pour engager des pourparlers de paix directs entre le gouvernement afghan et les Talibans ». « Nous ne pouvons pas laisser passer cette occasion », a plaidé Mme DiCarlo. 

Le chef de la diplomatie suisse, Ignazio Cassis, a quant à lui affirmé que Berne était « disposée à accueillir tout cycle de pourparlers ».

Mais pour que cette paix soit durable, les Nations Unies ont indiqué qu’elle doit reposer sur un large consensus impliquant l’ensemble de la société. « Les femmes doivent participer pleinement au processus de paix et les droits humains de tous doivent être garantis. Les acquis sociaux de l’année écoulée doivent être préservés et développés », a ajouté la Secrétaire générale adjointe de l’ONU chargée des affaires politiques.

L’ONU entend continuer à apporter son aide au gouvernement afghan dans la mise en œuvre de son programme de réformes et de prendre d’autres mesures essentielles pour parvenir à la paix, au développement et à l’autosuffisance pendant cette Décennie de la transformation.

Mais en attendant, d’autres urgences sont là. Pour le Président afghan, le conflit et la pauvreté ont été aggravés cette année par une sécheresse terrible qui a généré d’immenses souffrances humaines. « Trois millions d’Afghans dans trois provinces sont urgemment dans le besoin et huit millions de personnes de plus dans 26 provinces connaissent des conditions de crise », a dit le Président Ghani.

« La sécheresse est à l’échelle d’une crise », a-t-il insisté tout en ajoutant que les autorités afghanes vont lancer prochainement un appel de fonds afin de venir en aide et de « permettre à ceux qui sont frappés par la sécheresse de pouvoir tenir jusqu’à la prochaine saison des récoltes ».