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Au Myanmar, le nettoyage ethnique des Rohingyas se poursuit (ONU)

Un enfant réfugié rohingya âgé de trois ans devant l'abri que sa famille est en train de construire dans le camp de fortune de Balukhali, à Cox's Bazar, au Bangladesh.
Photo UNICEF/Nybo
Un enfant réfugié rohingya âgé de trois ans devant l'abri que sa famille est en train de construire dans le camp de fortune de Balukhali, à Cox's Bazar, au Bangladesh.

Au Myanmar, le nettoyage ethnique des Rohingyas se poursuit (ONU)

Droits de l'homme

Le nettoyage ethnique des Rohingyas du Myanmar se poursuit, a dénoncé mardi le Sous-Secrétaire général des Nations Unies aux droits de l'homme, Andrew Gilmour, au terme d'une visite de quatre jours au Bangladesh.

« Je ne pense pas que nous puissions tirer d'autres conclusions de ce que j'ai vu et entendu à Cox's Bazar », a ajouté M. Gilmour.

Au Bangladesh, le haut-responsable onusien a pu constater le drame des quelques 700.000 réfugiés qui ont fui le Myanmar depuis août dernier et qui, avec la saison des pluies, sont désormais confrontés aux risques d’inondations, de glissement de terrain et de maladies.

« Il semble que la violence généralisée et systématique contre les Rohingyas persiste », a déclaré M. Gilmour. « La nature de la violence est passée de l’effusion de sang et du viol collectif l'année dernière à une campagne de terreur et de famine forcée qui semble être conçue pour chasser les Rohingyas restants de leurs foyers vers le Bangladesh ».

Meurtres, viols, tortures et enlèvements et famine

À Cox's Bazar, le Sous-Secrétaire général et d'autres responsables de l'ONU ont pu interroger des Rohingyas récemment arrivés au Bangladesh. Ces derniers ont fourni des témoignages crédibles de meurtres, de viols, de tortures et d'enlèvements, ainsi que de famine.

Un certain nombre de personnes ont déclaré au haut responsable onusien que les Rohingyas qui tentent de quitter leurs villages ou même leurs maisons sont enlevés et ne reviennent jamais. Un homme a raconté comment son père avait été enlevé par l'armée du Myanmar en février. Il s’est vu enjoindre quelques jours plus tard de recueillir le corps. Il a raconté qu'il avait trop peur de demander à l'armée ce qui était arrivé à son père, mais que le cadavre était couvert d'ecchymoses.

Un autre homme a raconté avoir été ligoté par la police des gardes-frontières dans sa propre maison en janvier alors que sa fille de 17 ans avait été enlevée. Lorsqu’il a crié, ils ont pointé un pistolet sur sa tête et lui ont donné des coups de pied à plusieurs reprises. Quand il a essayé plus tard de retrouver sa fille, les policiers l’ont de nouveau battu, cette fois avec les crosses de leurs fusils. Sa fille n'a pas été vue depuis le 15 janvier.

Les cas de femmes et de filles enlevées et disparues sont courants. Leurs proches craignent le pire : qu’elles aient été violées et tuées.

« Le gouvernement du Myanmar est affairé à dire au monde qu'il est prêt à recevoir les rapatriés rohingyas alors que dans le même temps, ses forces continuent à les pousser vers le Bangladesh », a déclaré M. Gilmour. « La discussion doit maintenant se concentrer sur l'arrêt de la violence dans l'État de Rakhine, en veillant à ce que les responsables rendent des comptes ».

Le retour des Rohingyas au Myanmar est inconcevable

Dans les conditions actuelles, le Sous-Secrétaire général considère que le retour sûr, digne et durable des Rohingyas au Myanmar est inconcevable. Une conclusion partagée par tous les observateurs de la crise et qui repose sur trois facteurs.

De retour au Myanmar, les Rohingyas seraient confrontés de manière quasi certaine et immédiate aux menaces d'assassinats, de viols et d'autres formes de violences.

À court terme, la destruction et la mise à l’écart de toutes les sources de nourriture et de moyens de subsistance rendent leurs vies au Myanmar impossible.

À plus long terme, la volonté de s'attaquer aux causes profondes du problème est apparemment absente et s’est traduite par des politiques de discrimination contre les Rohingyas depuis des décennies, en particulier le refus des autorités du Myanmar de reconnaître leur droit à l’auto-identification et de leur accorder la citoyenneté.

« En fin de compte, le monde ne peut pas permettre aux auteurs de ce cas brutal de nettoyage ethnique - que beaucoup croient être un génocide - d'être récompensés », a déclaré M. Gilmour.