L'actualité mondiale Un regard humain

Objectifs de développement durable : la FAO signale une stagnation des indicateurs de l’alimentation et de l’agriculture

Une femme récolte des haricots dans une ferme coopérative au Kenya.
© FAO/Fredrik Lerneryd
Une femme récolte des haricots dans une ferme coopérative au Kenya.

Objectifs de développement durable : la FAO signale une stagnation des indicateurs de l’alimentation et de l’agriculture

Développement durable (ODD)

D'après un nouveau rapport publié par l'Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO), la pandémie de la Covid-19 est venue compliquer la concrétisation des Objectifs de développement durable (ODD) et le suivi des éventuelles avancées.

« Il nous faut de meilleures données qui permettront de tracer la meilleure voie à suivre pour arriver à destination », a expliqué Maximo Torero, Economiste en chef à la FAO.

« En savoir davantage sur les résultats de notre action à l'heure actuelle et sur le rythme de notre progression nous aidera à axer nos activités et nos mesures sur des interventions ciblées visant à atteindre les ODD », a-t-il ajouté .

La crise sanitaire mondiale inédite, dont les répercussions sont économiques aussi bien que sociales, complique davantage la concrétisation des cibles de ces ODD, indique le rapport Suivi des progrès accomplis dans le cadre des indicateurs des ODD liés à l'alimentation et à l'agriculture.

On constate une hausse de la faim, ainsi que d'autres formes d'insécurité alimentaire. La pandémie a par ailleurs eu des effets préjudiciables sur des pratiques de longue haleine, notamment la conservation des ressources génétiques, ainsi que sur des activités à court terme, comme les recensements agricoles nationaux. Ces deux volets sont essentiels pour recenser les besoins immédiats et encourager les agriculteurs du monde entier à adopter des pratiques plus durables.

Les recensements ont été retardés, reportés ou suspendus dans plus de la moitié des 150 pays où ils devaient avoir lieu. Un quart des pays environ affirme que la Covid-19 a perturbé les activités des agences nationales de statistique, et la quasi-totalité des activités de collecte de données de première importance en ont pâti, ce qui complique considérablement les travaux que mène la FAO en sa qualité d'organisme responsable de 21 des cibles relatives aux ODD et d'organisme contributeur à cinq autres.

Des tendances positives malgré un tableau préoccupant

Le rapport évalue les tendances actuelles, dont beaucoup stagnent (notamment l'indicateur de référence relatif à la faim, soit la prévalence de la sous-alimentation qui est utilisée pour contrôler la cible 2.1 des ODD), voire se dégradent (comme l'échelle de mesure de l'insécurité alimentaire vécue, un indicateur plus large appliqué à cette même cible).

Pour un certain nombre d'indicateurs, en particulier ceux qui mesurent la productivité et les revenus des petits exploitants qu'il est prévu de doubler d'ici à 2030, on ne dispose pas de données suffisantes qui permettraient d'évaluer à la fois leur état actuel et leur progression.

« Les membres peuvent compter sur la FAO, qui les aidera à naviguer dans la méthodologie souvent complexe et à obtenir des résultats harmonisés et comparables, condition indispensable à la nécessaire accélération des efforts en vue de la réalisation des ODD, tandis que nous entrons dans une Décennie d'action cruciale qui culminera en 2030 », a déclaré Pietro Gennari, Statisticien en chef de la FAO.

« Bien que le tableau d'ensemble soit préoccupant, il importe aussi de souligner les tendances positives, notamment l'amélioration de l'efficience de l'utilisation de l'eau en Asie du Sud, l'intensification des activités de conservation des ressources phytogénétiques en Afrique du Nord, les progrès accomplis en vue de la gestion durable des forêts et les avancées en matière de lutte contre la pêche illicite, non déclarée et non réglementée », a-t-il ajouté.

Séchage au soleil des tomates par des femmes de la région à Louxor, en Égypte, dans le cadre des activités de l'Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO) visant à réduire les pertes alimentaires
© FAO/ Egypt
Séchage au soleil des tomates par des femmes de la région à Louxor, en Égypte, dans le cadre des activités de l'Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO) visant à réduire les pertes alimentaires

L'innovation peut couper court aux perturbations 

« La crise de la Covid-19 complique la tâche mais elle est aussi l'occasion de trouver des possibilités inédites afin de travailler de façon plus intelligente, plus rapide et plus soutenue», a ajouté M. Torero, qui présentait aujourd'hui à Genève le rapport aux côtés de M. Gennari, lors d'un événement en ligne.

La FAO a créé un laboratoire des mégadonnées et un outil connexe en vue de recueillir des informations en temps réel liées à une série d'indicateurs, un outil de suivi et d'analyse des prix alimentaires et la Plateforme de données fondée sur le SIG de l'Initiative Main dans la main. Elle redouble également d'efforts afin de rendre publiques toutes les données.

L'Organisation exploite d'autres sources d'informations en vue d'aider les Membres à évaluer en temps réel les répercussions des perturbations engendrées par la pandémie sur les systèmes alimentaires et à repousser les limites qui freinent actuellement la collecte de données sur le terrain.

Par ailleurs, on utilise les images obtenues par satellite pour identifier et contrôler les risques de déstabilisation de la production végétale et des chaînes de valeur associées. Des modèles d'apprentissage automatique ont été mis au point afin de trier et de classer les perspectives de récolte, qui sont intégrées à d'autres ensembles de données, en particulier les mesures restrictives des gouvernements et les tendances relatives aux effets de la Covid-19, ce qui permet de prendre des décisions en s'appuyant sur des éléments concrets.

Grandes conclusions: quelques exemples

Les données relatives à la productivité agricole sont rares, mais plusieurs éléments indiquent que les petits producteurs d'aliments accusent un certain retard par rapport aux exploitants à plus grande échelle. Les données sur leurs revenus, relativement plus fournies, révèlent que dans la plupart des pays, les petits agriculteurs gagnent à peine la moitié de ce que touchent les grands producteurs.

En 2019, on disposait dans le monde de 5,43 millions d'échantillons de ressources phytogénétiques pour l'alimentation et l'agriculture, contre 4,21 millions en 2005. Toutefois, les efforts visant à garantir la diversité des espèces cultivées en ce qui concerne les variétés sauvages apparentées à des variétés cultivées et les espèces sous-utilisées restent insuffisants.

Le nombre de races d'élevage dotées d'un matériel génétique suffisant pour assurer leur reconstitution en cas d'extinction a été multiplié par 10 entre 2010 et 2019, mais elles ne représentent toujours que 101 des quelque 7 600 races connues à travers le monde, dont 73% environ sont menacées d'extinction.

L'égalité entre les sexes, au regard des droits fonciers dont les femmes sont bénéficiaires, est loin d'être une réalité et, dans de nombreux pays, les dispositions juridiques ne protègent pas comme il se doit les droits des femmes sur les terres. À cet égard, seuls 12% des pays examinés garantissent un très haut degré de protection.

Les forêts continuent de perdre du terrain et la viabilité des stocks ichtyologiques mondiaux recule, à un rythme moins soutenu qu'auparavant toutefois. Les investissements publics consacrés à l'agriculture, mesurés en proportion du PIB, ont diminué d'environ un tiers depuis 2001, et c'est en Asie, où le niveau d'investissement était important, qu'on a constaté les baisses les plus nettes.

« Nous devons travailler en concertation à la recherche de nouvelles possibilités qui nous permettront de recueillir les informations nécessaires pour susciter les changements que le monde s'est engagé à faire advenir », a conclu M. Torero. Consultez le rapport dans son intégralité  ici.